Article – Coûts et cloud : les bonnes pratiques FinOps
« L’aventurier aime la discipline », écrivait Pierre Mac Orlan, bien avant l’invention du cloud. D’une intuition limpide, il résumait déjà les enjeux auxquels font face les entreprises engagées dans la transformation de leur IT. Accessibilité, élasticité, déploiement rapide : les bénéfices des ressources cloud ne sont plus à démontrer. Dans le même temps, leur gestion et leur déploiement demandent une approche rationnelle afin d’éviter une explosion des coûts. À la frontière entre l’approche économique, l’expertise technique et la dimension métier, les FinOps (Finances & Opérations) répondent à cet enjeu. Intégrées aux pratiques DevOps, elles impliquent le déploiement d’une architecture technique optimisée, l’identification des services les plus efficaces (PaaS, IaaS, serverless…), ainsi que l’établissement d’une gouvernance rigoureuse de l’ensemble des ressources cloud. À l’image des dispositifs de gestion des coûts qui structurent tous les domaines de l’entreprise, l’intégration des méthodologies FinOps est en train de devenir une condition sine qua non au déploiement du cloud.
Passer à l’échelle, sans confondre vitesse et précipitation
Il est difficile de contrôler ses dépenses lorsque l’ensemble des services est à portée de clic. Cette sagesse s’applique aux joueurs compulsifs, adeptes de l’in-app purchase, aux fanatiques du one-click buy d’Amazon, mais également aux gestionnaires d’infrastructures IT ! « Aujourd’hui, le déploiement d’un environnement cloud est largement simplifié par les hyperscalers, qui permettent de tester ressources et services sans regarder à la facturation », explique Emmanuel Caro, Service Owner Marketing en charge de la gamme des Services professionnels et Sécurité chez Orange. Pour des organisations habituées aux coûts fixes et aux investissements programmés, le paiement à l’usage (Pay As You Go) qui caractérise le cloud peut rapidement se transformer en piège.
C’est à ce moment qu’interviennent les démarches FinOps, qui permettent aux entreprises d’intégrer ces nouveaux modes de consommation au sein de leurs procédures d’achat, tout en optimisant l’utilisation de leur infrastructure. Elles s’appliquent aux entreprises qui ont mené une politique lift & shift de réplication de leur infrastructure dans le cloud, et qui constatent une explosion des coûts. Elles s’appliquent également à celles qui souhaitent entamer leur migration, et qui pourront intégrer les logiques FinOps dès le départ.
Les bonnes pratiques, de l’audit à la gouvernance
Dans les faits, FinOps est un processus itératif et continu que l’on peut condenser autour de quatre grands axes.
Le premier volet est technique. Toute démarche FinOps doit s’appuyer sur une phase d’audit. Dans un premier temps, celle-ci peut s’appuyer sur les outils natifs des fournisseurs de cloud, tel que TCO chez AWS, qui propose un simulateur de coûts. Cette phase cruciale permet d’identifier les principaux points bloquants : services orphelins, volumes disques oubliés ou encore environnements de développement qui fonctionnent inutilement la nuit… La dimension technologique intègre également une grande connaissance des catalogues proposés par les fournisseurs de cloud afin d’adapter les recommandations aux usages.
Le volet stratégique est directement lié à l’aspect technique. « La démarche FinOps prend en compte les coûts, mais elle ne peut faire l’économie d’une vision à long terme et d’une anticipation des futurs services », précise Alexis Dupuydauby, directeur marketing Cloud Professional and Managed Services chez Orange. Ainsi, une application critique ne pourra pas être déployée uniquement sur les services natifs d’un fournisseur. La portabilité doit être anticipée. Dans ce contexte, les architectures les plus optimisées et scalables sont privilégiées, afin de prendre en compte les contraintes business.
Ces dispositifs complexes appellent une transformation profonde de la gouvernance. Les démarches FinOps s’appuient sur un socle méthodologique qui doit permettre une gestion rigoureuse des infrastructures. Le balisage des services et le tagging permettent d’allouer les dépenses à leurs consommateurs réels, et donc de faciliter le suivi tout en responsabilisant les équipes. Le tiering permet une hiérarchisation de l’importance des données, et donc une utilisation optimale des disques en fonction de leur coût…
Enfin, FinOps est un véritable changement culturel. Sa mise en place implique un important volet de formation aux outils et aux méthodologies. Elle demande une implication du plus haut degré de hiérarchie et ne peut se faire sans un effort de communication et d’accompagnement du changement. À ce titre, les mécaniques de récompense pour la réduction de la consommation des ressources offrent un bon exemple de transformation culturelle au sein des entreprises.
Bien orchestrés, les différents leviers FinOps permettent aux organisations de réaliser d’importantes économies et de tirer le meilleur parti de la révolution cloud, sans mauvaises surprises.